CONSEILS DES PIERRES AU MARCHEUR
Quitte la ville
et son armure schisteuse,
Exile-toi vers
la coulée solaire,
Choisis-toi un
itinéraire poussiéreux,
une route poussiéreuse,
Laisse-toi
guider par les flaques des
rivières,
Bondis d’un val
à l’autre par les cols vermeils,
Evite les
vallées calcinées par le soleil,
Anticipe ta soif
à la musique des averses chaudes,
Rassasie-toi de
miettes à l’odeur fauve,
Ne t’endors pas
à l’ombre des scories dorées,
Prends avis
auprès des fougères aimées,
Admire la résine
coulante des branches sombres,
Oublie tes
craintes dans la pénombre,
Cherche l’énigme
des mots pierreux,
Ne
sombre pas dans le chaos sonore
des ruisseaux.
Paul (
stage écrire et
marcher, juillet 06)
Un visage
minéral
une peau sable
traversée des veines de la terre
laisser courir mes doigts
sur ce visage
en caresser la
mousse
effeuiller tranquillement
chacune de ses pentes
traverser un regard ombragé
et oublier
les courbes sinueuses, les routes asphaltées...
Anne (
stage " écrire et
marcher")
Il est trop tôt pour mourir
il fait trop triste pour se souvenir
les feuilles sont décédées, mortes
sous mes pas
elles ne se rappellent pas
le temps fait des ronds dans l'eau
il fait le paon, se croit le plus beau
Monsieur m'inflige des rides
des jours fanés
sur le calendrier
des trop tard
des plus jamais
mais moi j'ai ton sourire
l'instant de ton regard.
les arbres sont accrochés au ciel
mon rire est éternel
un bourgeon d'enfance
velouté
apaisant au toucher
un espoir de feuilles tendres
une odeur de barbe coupée
maintenant est de sève
de printemps et de rêve
peu importe l'été
l'automne retrouvé
les saisons superposées.
le temps peut crever de démesure
se vautrer de vanité
dans tes yeux j'ai vu l'enfance
un éclair d'insouciance
un croc en jambe à la croqueuse
un pied de nez à la faucheuse
je me ris du temps qui se moque de moi
je ris par toi
tes yeux sont là
Véronique ( stage " écrire et marcher")
HAIKUS
l'heure du pique-nique
le pain et le saucisson attendront
j'ai surtout faim de toi
le petit bébé dort
une mouche pourrait le réveiller
j'en tremble de bonheur
putain, ton rimmel coule
toute la marchandise est exposée
rassure toi, je vais payer
Jacques ( stage "
écrire et marcher" )
une maison blanche
montagne est son miroir
merci la neige
pêche,
je mange
pêcheur, la truite est là
dépêche toi
Pascal ( stage "
écrire et marcher" )
POEMES
BOULES DE NEIGE
Clapotis
glaise craquelée
la pluie coule
sur ma gorge incendiée
douceur humide, impromptue, apaisante, salvatrice,
la respiration des forêts renait, capiteuse
exubérante, la cascade maltraite les rochers
calcinés
vite, un abri, où se jouer de l'ondée
de la marche brisée surgissent les pensées
pluie de souvenirs, pluie de pensées
pluie de souvenirs, pluie de passés
une larme séchée au vent
une petite truffe amie
bienheureuse averse
marchons!
Françoise (
stage " écrire et marcher" )
A
l'abandon
sur le sol
déposé en lui même
un tronc lisse et argenté
pareil à un membre amputé, pourtant
si doux et tiède, criant une caresse
étreint par une mousse muette, verte et
ruisselante
rescapée du grand balancement de
l'hiver
cet hiver où nous avons oublié
notre amour et ses conjugaisons
deux fantômes de pluie
sur le trottoir
gris noir
marchent
Anne ( stage "
écrire et marcher"
)
désert
désert aride
bouche muette assoiffée
soleil brûlant, peau brunie
grain de peau craquelée, amertume
coulent sans bruit, vague à l'âme
désert brûlant, soleil aride, chagrin
muet, visage
mouillé
inondé, baigné de larmes et de rires
éclat de rire, torrent de vie
viens, chante, danse, souris
souris à pleines rides
larmes de joie
océan salé
immensité
Véronique (
stage " écrire et marcher" )
VIATIQUES
Vas-y! marche!
marche quand même
lave toi l'esprit!
rince ton âme
on verra bien après
tu n'es pas fatigué
c'est une idée
les mauvaises idées gouvernent le monde
ose marcher contre elles
tu te sentiras moins seul
marche au gré de ta fantaisie
ne t'impose rien
surtout pas de rendement
ce sont les hommes qui ont inventé le rendement
pas les oiseaux
Ils chantent quand ça leur chante
laisse chanter tes pieds sur le chemin
ça libère
ça ouvre les barrières de l'esprit
ne marche pas trop vite
prends le
temps de regarder
Thérèse
( stage " écrire et marcher" )
Ce que je voudrais sauver du
siècle passé
des maisons sans serrures
des nuits noires étoilées
des forêts sans
voitures
leurs chemins empierrés
des lieux que l'on quitte
plus beaux que trouvés
les " bonjour" qu'on se
dit
les après-vous Monsieur
l'étranger qui s'arrête
et le temps de parler
des foules pour se perdre
la solitude pour se retrouver
et mes fenêtres ouvertes
quand mes
insectes bruissaient.
Jean
Thévenard ( MJC
Lorraine, Vandoeuvre )
Hommage à Nazim Hikmet
Un tombeau pour vous, Nazim?
que pourriez vous en faire?
seriez vous mort
au point de vous taire?
Vous faut-il maintenant
une dalle fichée dans le sol
quand de votre cellule
vous ne songiez qu'à l'envol!
Vous faut-il maintenant
des mots gravés sur la pierre,
alors que vous les vouliez toujours
franchissant les frontières!
Vous faut-il peut-être
des grilles dorées, de belles charnières?
vous ne supporteriez jamais
la liberté prisonnière!
Ce que nous vous devons, Nazim,
c'est une scène, un immense podium,
où répéter sans cesse, et sans haine,
les innombrables chants des hommes.
Jean Thévenard
( MJC Lorraine, Vandoeuvre )
Ecorchure terrestre
Ici,
là-bas, je, tu,
nous, ils sur terre
unis?
ici, là-bas, ils tuent nous sur la terre
unis vers
éclats de terre
fragments de chair
poussières redevenues
poussières
qui ne valent pas cher sous l'oeil conciliant de porte-paroles
à qui l'on glisse ces chairs
billets dans un porte-feuille, devenu paillasse puante, geyser, surface
de merd'Eux.
Carole ( atelier d'écriture, MJC Savouret )
Une hirondelle ne fait pas le printemps
une rondelle ne fait pas le pimpant
une doucelle ne fait pas le piquant
un nid rond ne fait pas longtemps
une rouelle ne se fait pas souvent
une cicadelle ne fait pas le bon temps
mais que fait- elle l'hirondelle?
Marie- Geneviève ( MJC
Savouret )
EPITAPHE
T'as voulu mesurer ta force à la force du monde,
t'as sucé toute l'encre pour écrire ta nuit,
t'as osé dire aux pierres qu'elles n'ont pas de visage,
tout était dit.
tu as crié que les âmes n'ont pas d'adresse,
tu as écrit sur ma peau: " et encore un..."
tu as oublié tes baisers sur le bord d'autres
lèvres....
t'as labouré, t'as semé, t'as
récolté,
au fond d'une grotte profonde,
si jeune et si tôt mort...
pauvre con, c'est ton sort.
L.F. (
MJC Savouret )
PARIS PARADIS
Parade hardie sous l'Arc et les drapeaux
pas rapides pour attraper le métro
appâts radieux des rides de tes quais
tu irradies, Paris, de dix mille rais
prix du
drap
botte de
radis
vive l'art
vive Paris
plie tes
draps
prends
tes radis
viens
à l'art
viens
à Paris
Parcs pris d'assaut dès que Râ apparait
paris risqués par les pro des haras
hâvre de paix mais rade du pire
tu m'as pris, Paris, mais tu ne m'auras pas
prix du drap
botte de radis
vive l'art
vive Paris
plie tes draps
prends tes radis
prends ta part
quitte Paris
L.F. (
MJC Savouret )